Lors de la convocation de Rudolf Höß (le commandant du camp d'Auschwitz) à Berlin, Heinrich Himmler lui fait part du choix d’Auschwitz comme lieu principal d’extermination de la population Juive d’Europe. Il donne la date du 1er juillet 42 comme début de "l’action". Il se fonde sur la décision de mise en place de l’immense camp de Birkenau et sur le chiffre annoncé par l'ingénieur Prüfer de l’entreprise Topf construisant les fours en octobre 41 pour la construction d’un crématoire qui aurait une capacité d’incinération de 1.440 corps par 24 h. Himmler ignore -ou veut ignorer- que Prüfer a revu ce chiffre largement à la baisse en annonçant une capacité de 800 corps lors de sa visite à Auschwitz le 31 janvier 42, après avoir expérimenté son premier four trimoufle à Buchenwald. Après sa visite du camp le 27 février 42, Hans Kammler (chef SS des constructions) confirme à la Topf cette commande de cinq fours trimoufles en annonçant simplement qu’ils ne seraient pas à installer à Auschwitz 1 mais à Auschwitz-Birkenau. Ainsi furent prises les décisions qui firent de Birkenau le principal centre d’extermination.
Mais à Auschwitz, rien n’est prêt pour répondre aux attentes de Himmler. Le K 1 lui-même n’est plus utilisable depuis la surchauffe de la cheminée le 30 mai qui menace de s’effondrer (attribuée par J.C. Pressac dans « les Crématoires d’Auschwitz » à "une probable utilisation inconsidérée des fours à la suite d’une brutale remise en marche"). Les travaux de démolition de cette cheminée puis de construction d’une nouvelle ne commenceront que le 12 juin. Du futur K II, les travaux n’en sont qu’au creusement de fondations par un Kommando de cent prisonniers. Le seul lieu d’extermination est alors le Bunker 1. Ainsi Höß prend-il la décision de mettre immédiatement en place un nouveau lieu sur le même principe que le Bunker 1. Il sera appelé Bunker 2. D’après le « Kalendarium » de D. Czech, sa première utilisation pourrait être datée du 30 juin 42.
Il s’agit, comme dans le cas du Bunker 1, d’un bâtiment déjà existant ayant appartenu à un paysan Polonais, que de rapides travaux vont adapter à la fonction que les SS lui ont destinée (essentiellement murer les ouvertures non souhaitées et transformer les autres –portes et lucarnes- afin de les rendre étanches). Il se trouve également en bordure du camp de Birkenau (pour la localisation, voir plan en bas de la page "les crématoires" du présent site). Comme au Bunker 1, deux baraques de déshabillage seront installées à proximité (et trois à partir de juin 44).
Il est plus grand que le Bunker 1. Les fondations retrouvées montrent qu’il mesure un peu plus de 17 m sur 8, soit 120 m² intérieurs environ. Mille à mille deux cents personnes y étaient entassées à la fois (1.200 d’après Höß). Il comporte quatre chambres à gaz placées en parallèle. Il est opérationnel dès la fin du mois de juin 42. Chacune des chambres à gaz a une lucarne permettant que les SS jettent le Zyklon à l’intérieur, et deux portes : une porte d’entrée et une de sortie. Cela permet de supprimer le problème d’attente durant l’aération (ou le port de masques à gaz) que les SS ont rencontré au Bunker 1. Tous les témoignages de prisonniers du Sonderkommandos survivants confirment cette configuration, ainsi d’ailleurs que le plan dessiné par les Soviétiques le 3 mars 45. Le SS Perry Broad écrira dans son témoignage que ce bâtiment « avait un nombre étonnant de portes d’une épaisseur extraordinaire ». Les portes d’entrée sont toutes sur la même façade. Shlomo Dragon, dans sa déposition du printemps 45 pour le procès de Cracovie, expliquera que, sur chacune, lorsqu’elles étaient ouvertes, était indiqué un « Zum Baden » destiné à rassurer les futures victimes. Lorsqu’elles étaient fermées en revanche, on pouvait lire un « Hochspannung. Lebensgefähr » qui, lui, prévenait toute ouverture intempestive (avant que les chambres à gaz ne soient vidées et nettoyées). Les portes de sortie donnaient toutes sur un petit chemin de fer et ses "Loren", wagonnets destinés à faire amener les corps par les membres du Sonderkommando jusqu’aux fosses de crémation situées un peu plus loin.
Les 17 et 18 juillet 42, Himmler revient à Auschwitz (avec plusieurs haut gradés de la SS : Bracht, Schmauser et Kammler le responsable des constructions dans les camps). Il vient constater la progression des travaux divers (pour l’entreprise IG Farben au chantier de la Buna à Monowitz, à Rajsko) et la mise en place de son ordre d’extermination. Il assiste ainsi à la sélection (entre "aptes" à travailler et "inaptes" : femmes, enfants de moins de 16 ans, personnes âgées) d’un convoi de Juifs de Hollande, puis à leur gazage, au Bunker 2 d’après Höß. Le deuxième jour, il visite le camp souche (camp des femmes notamment, où il assiste à une punition, fait rapporté par D. Czech comme par JC. Pressac). Au K I il voit les trois fours bimoufles et la nouvelle cheminée en construction.
Karl Bischoff, SS à la direction des constructions (Bauleitung), établit un rapport des besoins envoyé à Berlin le 03 août 42 (devis accepté en septembre) dans lequel figure la demande de quatre baraques en bois destinées à faire office de vestiaires près des Bunkers. La phrase du document écrit (in Pressac, p.46) est la suivante : «4 Stück Baracken für Sonderbehandlung der Häftlinge in Birkenau». Cinq leur furent allouées le 14 septembre : deux seront installées près du Bunker 1 et trois à proximité du Bunker 2.
Au printemps ou à l’été 43, ce Bunker cesse d’être utilisé parce que les K IV et II sont terminés et entrent en service en remplacement. Il n’est pas détruit pour autant, seules le sont les baraques de déshabillage.
Au printemps 44, la déportation et le massacre des Juifs Hongrois vont commencer. Toutes les capacités du meurtre de masse à Birkenau sont mobilisées et le Bunker 2 est remis en service (de mai à septembre 44). Cette fois ce seront trois baraques de déshabillage qui seront installées à proximité. D’après l’historien Gideon Greif, le nombre de victimes ayant trouvé la mort au Bunker 2 peut être estimé à 100.000.
[plan utilisé ici: celui qui figure sur place, émanant du Musée d'Auschwitz-Birkenau.]
Un autre texte sur le présent site concernant les Bunkers 1 et 2 : une "page zoom" évoquant un dessin de David Olère qui a été nommé "Bunker 2" mais pourrait bien représenter le Bunker 1 (accessible en cliquant ici).
[Mise en ligne de cette page en janvier 2008]