La "rééducation" des catégories de population considérées comme inacceptables par Hitler et l'idéologie nazie tels les opposants politiques, les homosexuels, les handicapés et ceux qui étaient jugés "asociaux" ; a été mise en place dès 1933 dans les camps de concentration nationaux-socialistes où la règle a très vite évolué vers les mauvais traitements extrêmes (épuisement par la faim, le travail, les coups, le froid, l'absence globale de tous soins).
Cela ne suffisait pas pour réaliser le dessein du nazisme. Outre la persécution des Tziganes, l'ennemi numéro un rendu responsable de tous les maux était "le Juif". Après quelques hypothèses de type migratoire, se sont à l'inverse fermées les frontières du Reich : les Juifs d'Europe se voyaient enfermés, à la disposition de leurs bourreaux. Diverses expérimentations du "meurtre de masse" ont élors été mises en place par les nazis pour résoudre la "question juive" qui en fait correspondait à : comment faire disparaître des millions d'êtres humains dans un temps aussi bref que possible ? Dans une première étape (sur le front de l'Est) le procédé choisi pour concrétiser cette décision fut celui de tueries perpétrées par les SS et la Wehrmacht avec des aides (Ukrainiens notamment). La seconde vit la mise en place de centres de mise à mort : les camps d'extermination, à savoir Belzec, Chelmno, Sobibor, Treblinka puis Auschwitz et Majdanek. Ainsi, le procédé "des camions" (asphyxie par les gaz d'échappement envoyés à l'intérieur du véhicule dans lequel étaient enfermées les victimes) fut opérationnel dès décembre 41 à Chelmno où fut envoyée une partie des prisonniers juifs du ghetto de Lodz. Dans les camps de l'"Aktion Reinhardt" ce furent des chambres à gaz fixes où était utilisé le monoxyde de carbone produit par un moteur. A Auschwitz-Birkenau ils utilisèrent le Zyklon. Ces camps étant devenus "Todesfabrike" (all.), "Továrny na smrt" (tch), "usines de mort" ; il fallut du personnel pour y travailler. Ce furent les Sonderkommandos.
À leur arrivée dans les camps d'extermination, les déportés des convois, éprouvés par les conditions de transport que l'on sait et, dans le cas des Juifs qui arrivaient de ghettos, dans un état d'épuisement physique et mental extrème, étaient immédiatement gazés, à l'exception de quelques uns qui étaient utilisés aux travaux du camp, c'est à dire essentiellement à "l'usine de mort". A Auschwitz en revanche, ils étaient la plupart du temps "sélectionnés". C'est-à-dire triés en deux groupes, ceux qui iraient vers les chambres à gaz puis les fours crématoires, et ceux qui n'iraient pas encore. Dans ce premier groupe, les médecins SS plaçaient tous les gens physiquement faibles (la plupart des femmes, les enfants, les personnes âgées). Le second groupe (représentant un faible pourcentage) était ensuite réparti dans divers commandos de travail, occasionnellement selon les compétences personnelles des déportés. Parmi les prisonniers de ce groupe, des hommes jeunes et robustes étaient affectés aux Sonderkommandos. Ce terme signifie : commandos spéciaux. On connaît la protection des formules sibyllines derrière lesquelles se cachaient les horreurs nazies : ainsi imposait-on aux "commandos spéciaux" la charge du "traitement spécial" (Sonderbehandlung) permettant la "solution finale de la question juive" (die Endlösung der Judenfrage). Pour être "spéciaux" ils l'étaient.
A Auschwitz puis Birkenau, ces hommes ont découvert avec horreur les "Krematorien" (lieux regroupant la salle de déshabillage, la ou les chambres à gaz et la salle des fours) qui seraient leurs lieux de travail. Bien souvent leurs premières heures étaient d'une violence inimaginable puisqu'ils étaient amenés à devoir sortir leurs femmes, soeurs, divers parents et amis des chambres à gaz pour les incinérer. Aucun des membres des Sonderkommandos n'aurait dû survivre : ils étaient aisément "liquidés" et remplacés par une sélection parmi les nouveaux arrivants dont le premier travail serait d'éliminer les corps de leurs prédécesseurs. Aucun ne devait survivre parce qu'ils en savaient trop. Leurs témoignages aujourd’hui nous sont (ou devraient nous être ?) d'autant plus précieux que personne d'autre ne peut dire ce qu'ils savent. Mais on leur a reproché d'avoir été ce qu'on leur a imposé d'être.
Comment revenir dans la vie après la nuit des camps ? Comment redevenir un humain vivant dans son propre regard et dans le regard d'autrui a fortiori si celui-ci vous rend coupable de l'épouvante que vous avez vécue, voire vous classe dans une catégorie de collaborateurs de l'extermination et des bourreaux ? Comment se supporter soi-même au regard de ce que l'on a dû faire ? Comment supporter les images d'horreur qui vous assailliront indéfiniment et que vous avez honte de formuler, que vous ne pouvez supporter d'entendre hurler dans votre tête, que personne n'a la force d'entendre, que vous n'avez pas la force d'exprimer, que vous ne pourriez exprimer car il vous semble que les mots n'existent pas ?
Ce site s’intéresse donc à ces hommes en particulier. Il se construit par le regroupement et le rapprochement de connaissances éparses sur les aspects matériels et humains concernant les Sonderkommandos. Il se limite à ce domaine dans l’ensemble du considérable sujet d’étude et de réflexion qu’est définitivement pour tous la Shoah. Je voudrais avec ce site entendre tout ce qui a pu se dire, essayer de comprendre tout ce qui peut être compris, poser mon infime petite pierre sur la tombe et la cendre de toute cette souffrance. Ecouter et entendre.
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