photo archives 1945 Tauber Dragon Sonderkommando Auschwitz
Les textes disponibles ici sont les dépositions des trois membres des Sonderkommandos qui témoignèrent lors du procès d’Auschwitz à Cracovie en 1947. Ils sont parus dans le livre "Des Voix sous la cendre" (voir la bibliographie). Il s’agit de :

Szlama DRAGON, né le 19 mars 1920 à Zeromin, en Pologne (à 100 km au NO de Varsovie). Sa famille fut déportée à Nowy Dwor puis au ghetto de Varsovie qu’il réussit à quitter avec son frère Abraham, leur petite sœur, leur petit frère et leur mère, pour Plonsk, puis le ghetto de Mlawa d’où ils arrivèrent à Auschwitz en décembre 1942. Après avoir passé la première sélection avec son frère, ils furent affectés au Sonderkommando trois jours après leur arrivée.
Lors de son décès en Israël en octobre 2001, l’historien des Sonderkommandos d’Auschwitz, Gideon Greif, qui l’avait rencontré et interviewé à de nombreuses reprises, a écrit une très belle page pour dire l’immensité de sa tristesse devant la mort de cet homme dont la perte est à la fois celle d’un témoin essentiel de l’histoire des Sonderkommandos, et celle d’un homme aux nombreuses qualités humaines dont G. Greif dit par exemple « Shlomo war dagegen tapfer, mutig, stolz und bestimmend » (Shlomo était courageux au contraire, fier et déterminé).

Alter FEINSILBER, né le 23 octobre 1910 à Stoczek, en Pologne (à 100 km à l’Est de Varsovie). Je ne rappellerai pas ici d’éléments de sa biographie parce qu’il l’évoque lui-même en guise d’introduction dans sa déposition. Je voudrais en revanche souligner cette très belle image de la France qui apparaît dans son témoignage. Elle est, bien entendu, tout à fait accessoire pour le sujet qui nous occupe (et peu réaliste, hélas) mais elle touche évidemment la Française que je suis. En effet, de son engagement dans la guerre d’Espagne, c’est par les camps de St Cyprien, Argelès, Drancy et Compiègne qu’il passe en France ! Pourtant voici le souvenir qu’il en garde : « La population française était bien disposée à l'égard des Juifs. Des Aryens se faisaient apposer dans leurs documents l'inscription "Juif" pour protester contre cette manière de traiter les Juifs. La police Française devait obéir aux ordres Allemands. Les Français ignoraient le sort réservé aux déportés à Auschwitz car, dans le cas contraire, ils se seraient manifestés, j'en suis persuadé, contre ces déportations. » 
Cet homme qui avait une si haute idée de la France est mort en septembre 1987 à Paris.

Henryk TAUBER, né le 08 juillet 1917 à Chrzanow, en Pologne (à l’ouest de Cracovie, tout près d’Auschwitz). Il est arrivé à Auschwitz le 19 janvier 43 après avoir vécu dans le ghetto de Cracovie puis avoir été mis en prison. Le mois suivant son arrivée (02 février 43), il a été affecté au Sonderkommando du K I et à celui du K III en mars 43 comme "chauffeur". Son témoignage sur les crématoires et les chambres à gaz, très détaillé, a été fondamental. Bien plus tard, ces informations ont complété et confirmé les recherches sur documents qu’a pu faire Jean-Claude Pressac (lorsque ceux-ci ont pu être consultés). Ce témoignage est donc extrêmement utile et précieux, grâce à sa précision et son authenticité en tout point. Sa lecture est en effet impressionnante, par la construction du propos et la capacité de recul alors que cette déposition n’a été faite qu’en mai 45.
Contrairement à son ami Shlomo Dragon (avec lequel il est parvenu à s’enfuir lors de la marche d’évacuation), il est parti vivre en France et aux Etats-Unis et c’est en novembre 1999 qu’il est mort à New Jersey.

 

[Page mise en ligne au printemps 2006]